En 2018, le nombre de décès d’enfants dans les conflits armés a atteint des niveaux records à l’échelle mondiale.
La version originale de cet article a été publiée en anglais dans la version en ligne du Hill Times
Par David Morley, président et chef de la direction d’UNICEF Canada
Vingt-quatre mille. C’est le nombre d’enfants tués ou mutilés dans le cadre de conflits en 2018. Ce nombre est le plus élevé jamais enregistré par l’ONU depuis qu’elle a commencé à surveiller les six violations graves commises envers les enfants il y a près de 15 ans.
Pourquoi ce fait inquiétant ne fait-il pas partie des enjeux à l’occasion des élections fédérales au Canada?
Selon les nouvelles tendances observées, les enfants sont délibérément ciblés en situation de guerre. Des filles et des garçons sont de plus en plus souvent recrutés comme enfants soldats, exploités à des fins sexuelles et d’esclavage, ou utilisés comme boucliers ou kamikazes. L’utilisation généralisée d’armes d’emploi aveugle comme les armes à sous-munitions, les barils d’explosifs et les engins explosifs improvisés tue ou mutile des enfants à un rythme inimaginable. Les normes et les règles fondamentales en matière de protection des enfants, qui sont à la base même des accords de guerre universels et des droits de l’homme, sont enfreintes pratiquement en toute impunité.
Les écoles et les hôpitaux, historiquement protégés par le droit international, sont maintenant des cibles potentielles. Entre 2014 et 2018, des attaques ont été signalées dans 87 pays contre des écoles et d’autres établissements scolaires, alors qu’il s’agit d’endroits où les enfants s’attendent à être en sécurité et à retrouver un sentiment de normalité. Au cours de la première moitié de 2019, l’insécurité et la violence accrue envers les élèves et le personnel enseignement ont forcé la fermeture de 9 272 écoles en Afrique de l’Ouest et centrale, soit au Burkina Faso, au Cameroun, au Tchad, en République centrafricaine, en République démocratique du Congo, au Congo, au Mali, au Niger et au Nigéria.
Les dirigeants du monde entier doivent cesser de fermer les yeux sur ces atrocités.
Nos dirigeants devraient lancer des discussions, se tenir debout et montrer ce que le Canada fera pour protéger les enfants du monde entier. Notre pays est particulièrement bien placé pour agir en tant que leader à l’échelle mondiale.
Le Canada est l’un des quelque 40 pays qui se sont engagés à respecter les quatre principaux accords internationaux visant les enfants et les conflits armés : la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, les Principes de Paris, les Principes de Vancouver et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés. Si le Canada respectait pleinement ses engagements à l’égard de chaque accord et devenait un modèle à suivre pour les autres pays, il ferait ainsi un grand pas vers le rétablissement d’une norme, d’un principe universel et fondamental : que chaque enfant puisse jouir de droits inaliénables.
Le Canada a acquis une grande expertise et a accompli des réalisations remarquables dans le domaine de la protection des enfants, notamment en tant que collaborateur dans la création des Principes de Vancouver, un cadre pour la protection des enfants dans le maintien de la paix à différentes étapes d’un conflit. À ce titre, le Canada peut montrer la voie en ce qui a trait au suivi et au signalement des six violations graves : meurtres et mutilations d’enfants, recrutement ou utilisation d’enfants, violences sexuelles faites les enfants, enlèvements d’enfants, attaques contre des écoles et des hôpitaux et refus d’accorder un accès à l’aide humanitaire.
Enfin, en accordant la priorité à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes et des filles, le Canada a joué un rôle de premier plan dans l'élaboration de l’approche mondiale en matière d’aide internationale. Qu’il s’agisse des investissements notables dans l’éducation des filles en situation de crise annoncés lors de la réunion du G7 au Canada ou du renouvellement concret des engagements du pays en faveur de la santé des femmes, des enfants et des adolescentes et adolescents, le Canada a démontré que miser sur les femmes et les filles contribue à sortir des populations entières de la pauvreté tout en assurant une croissance économique durable et en favorisant la paix et la sécurité.
Les dirigeants canadiens peuvent aller plus loin en veillant à ce que leurs approches en matière de développement et d’aide humanitaire qui tiennent compte des particularités sexospécifiques reconnaissent que les enfants sont particulièrement vulnérables et ont des besoins particuliers en fonction de leur âge et de leur sexe.
Aucun enfant ne peut être laissé pour compte.
Le 21 octobre, les Canadiennes et les Canadiens ont le choix de mettre les personnes les plus vulnérables du monde au premier plan et de faire de leur vote un vote pour chaque enfant. Le Canada doit faire des droits, de la sécurité et du bien-être des enfants une priorité mondiale. L’escalade de la violence dans le nord-est de la Syrie devrait nous rappeler à tous que les enfants pris au piège dans les zones de conflit sont redevenus des cibles de première ligne. Ils ont besoin d’être soignés et protégés. Le prochain premier ministre du Canada y parviendra-t-il?