Journal d’une pandémie
Le 12 mars 2020 – C’est une journée comme les autres. Je suis consciente de la présence de la COVID-19 et je fais preuve de prudence. Néanmoins, je décide quand même d’aller comme d’habitude à la salle de sport. J’étudie pour mes examens finaux du baccalauréat international et je me sens bien. J’arrête pas de penser à la prédiction de mes profs qui partent du principe que je vais avoir des mauvaises notes à mes examens du BI, ce qui me pousse à tout faire pour leur prouver le contraire. Je suis extrêmement motivée à bien faire. Je viens de terminer une semaine chargée pendant laquelle j’ai eu un examen d’histoire, une dissertation sur l’épistémologie et un test de physique des particules. Ce sont quelques-uns des meilleurs travaux que j’ai rédigés, et je suis dans un très bon rythme d’études en préparation pour la semaine de relâche. Notre directeur a envoyé un courriel nous annonçant qu’un parent d’un des élèves de l’école avait reçu un test positif à la COVID-19, mais que l’école restait ouverte. Le parent était asymptomatique et les autorités sanitaires avaient donc jugé que le risque était faible. Malgré cela, mes parents m’interdisent d’aller à l’école le lendemain.
Le 13 mars 2020 – Je suis allée au restaurant avec une amie et j’ai remarqué qu’il était relativement vide, mais il n’y avait pas de signes avant-coureur.
Le 15 mars 2020 – Ma mère m’a demandé de ne pas aller à la salle de sport, alors nous avons acheté du matériel d’entraînement pour la maison. Pendant que mon père et moi étions sortis l’acheter (en respectant la distanciation physique, bien sûr), j’ai reçu un courriel m’annonçant que la salle de sport était fermée. C’est à ce moment-là que nous avons toutes et tous commencé à nous isoler et à garder nos distances.
Le 22 mars 2020 – La fin de l’année scolaire est reportée. On nous a annoncé que nos examens du baccalauréat international étaient annulés. Cela ne s’est jamais produit auparavant et cela touche plus de 200 000 étudiantes et étudiants. Je me sens particulièrement frustrée, car c’était l’occasion pour moi de prouver que les prédictions de mes profs étaient fausses, et j’allais être privée de ce plaisir. Bien que cela ne concerne en rien les offres universitaires, je me sens privée de la possibilité de terminer l’année en force. La bonne nouvelle, c’est que ma charge de travail a nettement diminué et que je n’ai plus aucune évaluation.
Le 23 mars 2020 – Nous avons reçu un courriel de notre directeur nous annonçant que notre bal des finissants n’aurait pas lieu et que des efforts étaient déployés pour organiser une réunion d’une manière ou d’une autre, mais pas de la façon habituelle, bien sûr.
Le 31 mars 2020 – C’est notre premier jour de cours en ligne. C’est bien difficile de rester concentrée, de garder la notion du temps, et de fixer un écran pendant huit heures. C’est même épuisant. Fort heureusement, le personnel enseignant a commencé à nous laisser travailler de façon indépendante pour la plupart des cours, ce qui facilite un peu les choses.
Réflexions :
Dans une situation comme celle-ci, il faut rester optimiste. J’ai parfois tendance à me sentir engloutie dans un trou noir de négativité. Il est difficile de faire autrement quand tout ce pour quoi vous avez travaillé semble vous être retiré. C’est mon travail à UNICEF Canada qui me permet d’avoir une attitude positive. Je me suis dit que, peu importe comment j’obtiendrai mon diplôme, je le ferai avec le sourire pour tous les jeunes du monde entier qui n’ont pas eu la chance de vivre pleinement leur dernière année de secondaire. C’est devenu mon exutoire. Lorsque mes amis se mettent à bouder, je leur rappelle gentiment que nous avons de la chance, peu importe ce qu’ils ressentent.
Le baccalauréat international est un programme difficile, et la plupart des élèves et du personnel enseignant sont d’accord avec moi. Au cours des deux dernières années, j’ai appris ce qu’était la productivité, en particulier en ce qui concerne mes études. En raison de la COVID-19, j’ai dû toutefois redéfinir cette notion de productivité. Au cours des dernières semaines, j’ai appris à profiter du temps présent, car, à quel autre moment au cours de ma vie aurai-je la possibilité de n’être entourée que de mon environnement familial?
Être sans cesse à la maison est malgré tout inhabituel. La plupart des éléments structuraux de mes journées ont disparu, et je ne sais pas quoi ressentir. Je ne peux pas m’empêcher de me demander si c’est à cela que ressemble le fait d’être un adulte et d’avoir autant de liberté. J’ai pris sur moi de faire des activités qui me plaisent, plutôt que celles qui me sont imposées. J’ai appris plein de choses sur des sujets qui m’intéressent, plutôt que sur ceux qui font partie du programme scolaire. Parfois, je fais aussi des balades en voiture en écoutant différents postes de radio pour avoir les dernières nouvelles sur la COVID-19 et la crise de l’OPEP. Cette distance physique n’est finalement pas si mauvaise, pour moi en tout cas. Elle n’est pas géniale non plus, mais je la respecte pour ce qu’elle est.
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