La science du bonheur
Si vous êtes comme la plupart des gens, la dernière année a été difficile. La COVID 19 a créé un certain nombre d’obstacles pour nous toutes et tous, certains plus grands que d’autres. Il est particulièrement important en ces temps difficiles de trouver des moments de bonheur et de joie. Pour en savoir plus sur la façon dont nous pouvons susciter notre propre joie (pour emprunter une phrase de Marie Kondo), nous nous sommes entretenus avec la Dre Elizabeth Dunn, professeure au département de psychologie de l’Université de la Colombie-Britannique.
La Dre Dunn étudie comment le temps, l’argent et la technologie façonnent le bonheur humain, et ses recherches ont montré, en particulier, en quoi le fait de donner aux autres et le bonheur sont plus liés que nous ne le pensions.
Qu’est-ce qui vous a incitée à étudier le bonheur?
J’ai toujours été fascinée par [le bonheur]. Je veux dire, pour moi, c’est une de ces choses qui captent naturellement l’imagination. J’ai eu la chance en tant qu’étudiante de premier cycle de travailler avec l’un des plus grands spécialistes mondiaux du bonheur, Dan Gilbert… Il m’a vraiment inspirée, et, à partir de ce moment, j’ai été passionnée et je voulais simplement en apprendre toujours plus sur le bonheur.
Quelle a été l’une de vos découvertes les plus intéressantes sur le bonheur?
L’une des choses les plus intéressantes que j’ai apprises dans le cadre de mon travail est que les gens semblent être plus heureux d’aider les autres que de s’aider eux-mêmes.
Dans l’une des premières [analyses] que nous avons faites sur le sujet, nous avons envoyé nos assistantes et assistants de recherche à l’Université de la Colombie-Britannique avec de l’argent en poche. Le matin, ils ont approché des gens, leur ont remis un billet de cinq ou de vingt dollars [et leur] ont demandé de le dépenser d’ici la fin de la journée. Mais il y avait une condition : la moitié des gens était invitée à utiliser cet argent au profit de quelqu’un d’autre, tandis que l’autre moitié devait s’en servir à son profit. À la fin de la journée, nous avons simplement appelé toutes ces personnes et leur avons demandé comment s’était passée leur journée et à quel point elles s’étaient senties heureuses.
Et nous avons appris de quelle façon exactement elles avaient utilisé l’argent. Ce que nous avons découvert, c’est que celles qui avaient été chargées de dépenser cet argent au profit de quelqu’un d’autre ont fini par se sentir plus heureuses ce jour-là comparativement aux personnes qui avaient été invitées à dépenser l’argent pour elles-mêmes.
Ce n’était à l’origine qu’une petite étude menée à l’université auprès de la population étudiante, mais, depuis, nous avons élargi cette recherche. Nous avons mené des études partout dans le monde et nous avons pu reproduire cet effet, non seulement dans des pays riches comme le Canada, mais aussi dans des pays où beaucoup de nos participantes et participants luttaient pour satisfaire leurs propres besoins fondamentaux.
Et les personnes, même parmi celles qui avaient du mal à joindre les deux bouts, [étaient] plus heureuses lorsqu’elles utilisaient leur argent au profit des autres plutôt que d’elles-mêmes.
Quel conseil donneriez-vous aux personnes qui souhaitent être plus heureuses?
Il y a beaucoup, beaucoup de façons d’y parvenir, mais une façon particulièrement agréable est de réfléchir à un moyen de redonner, car cela peut vous aider et aussi aider la société au sens large. Il s’avère, par exemple, que les personnes qui font des dons à des œuvres caritatives sont plus heureuses que celles qui ne le font pas, même après avoir pris en compte leurs revenus. Et cela est vrai dans les pays du monde entier. Nous avons étudié cela dans plus d’une centaine de pays et c’est ce que nous constatons encore et encore. Cela porte alors à croire que trouver un moyen de donner peut vraiment faire notre propre bonheur.
Nous avons toutefois découvert dans le cadre de nos recherches que le fait de donner ne se traduit pas nécessairement toujours par un plus grand bonheur pour tout le monde. La façon de donner compte. Il est donc important de trouver une cause qui vous tient vraiment à cœur, où vous pouvez vraiment imaginer en quoi votre don transforme des vies. Trouver ce genre de cause, [une cause à laquelle vous vous identifiez vraiment], peut réellement accroître votre bonheur.
Qu’avez-vous appris de la relation qui existe entre la gratitude, la générosité et le bonheur?
Mon amie Sarah Al fait actuellement un travail vraiment intéressant sur la gratitude, et d’autres études ont démontré que la gratitude est cette émotion puissante qui va au-delà de se sentir bien. Elle nous donne aussi envie de faire du bien. Certains chercheurs et chercheuses ont ainsi soutenu que la gratitude est une sorte d’adaptation à l’altruisme. C’est cette émotion qui nous pousse à vouloir aider les autres.
Nous éprouvons de la gratitude lorsque quelque chose de bien nous arrive, parce que [cela signifie souvent que] quelqu’un d’autre a fait [quelque chose] pour nous. Et, lorsque nous recevons ce bienfait d’autrui, cela nous donne envie non seulement de redonner à cette personne, mais de donner au suivant pour faire du bien à d’autres.
La gratitude est une émotion qui peut déclencher des sentiments de bonheur, mais elle peut aussi inciter les gens à vouloir faire preuve de générosité.
Le fait de parler avec la Dre Dunn est un bon rappel qu’ici, au Canada, nous pouvons être reconnaissants pour les choses auxquelles nous avons facilement accès, comme les vaccins contre la COVID-19, mais aussi de l’importance que le fait de donner peut avoir, non seulement pour les autres mais aussi pour nous-mêmes. En ce Mardi Je Donne, appuyez le travail de l’UNICEF et joignez-vous à nous pour défendre le droit de chaque enfant d’avoir une enfance >>