By Sandra Awad and Rasha Alsabbagh

« Pendant que les autres enfants allaient à l’école, je gardais des moutons », dit le jeune Ahmad, âgé de 13 ans, du village de Qseibeh, à Quneitra, dans le sud de la Syrie, en parlant de la façon dont les choses se passaient avant. Il y a deux ans, il a assumé une responsabilité bien au-delà de son âge pour subvenir aux besoins de sa famille. 

Mohammad, le père d’Ahmad, travaillait comme ouvrier du bâtiment rémunéré à la journée avec son fils aîné Abdelhadi, le frère d’Ahmad. Le modeste revenu qu’ils gagnaient permettait à peine de subvenir aux besoins des six membres de leur famille. 

En 2018, la famille a pu rentrer chez elle à Qseibeh après de multiples déplacements dus au conflit. Leurs ressources financières étaient épuisées. « Notre maison était gravement endommagée, alors nous sommes allés habiter dans la maison de mon oncle. Nous n’avions pas les moyens de réparer la nôtre », explique Ahmad. 

En 2020, le père d’Ahmad est tombé du toit d’un bâtiment sur lequel il travaillait. « Je n’oublierai jamais ce jour-là. J’étais à l’école lorsque l’accident s’est produit. Papa a été grièvement blessé », raconte Ahmad. 

Mohammad s’est trouvé temporairement paralysé suite à l’accident. Il a subi plusieurs interventions chirurgicales pour pouvoir à nouveau marcher à l’aide de béquilles. Il lui était impossible de reprendre le travail. Ahmad a donc dû quitter l’école pour aller travailler. 

A boy helps a man down a flight of stairs outside. The man has a walking stick in one hand.
Ahmad aide son père à descendre l’escalier devant leur maison dans le village de Qseibeh, à Quneitra, dans le sud de la Syrie. [UNICEF/UN0674216/Shahan]

« Je gardais les moutons de nos voisins tous les jours, du lever au coucher du soleil. C’était épuisant, mais ce qui m’attristait le plus, c’était de ne pas aller à l’école. Mes amis me manquaient aussi », dit Ahmad. Il travaillait pour subvenir aux besoins de sa famille et pour payer les soins médicaux et les médicaments dont son père avait tant besoin. 

À l’été 2021, deux jeunes bénévoles ont rendu visite à la famille d’Ahmad dans le cadre de leur programme de soutien pour les enfants du village. Ils ont parlé à Ahmad des services d’éducation offerts dans un centre soutenu par l’UNICEF à Quneitra. Les services visaient à aider les enfants et les jeunes à poursuivre leurs études et à les doter des compétences nécessaires pour passer en douceur de l’apprentissage au marché du travail. 

« J’ai senti toute la tristesse dans mon cœur disparaître après que les bénévoles m’ont encouragé à visiter le centre et ont expliqué le programme à ma mère. Elle semblait désireuse de m’y envoyer. Ce fut l’un des plus beaux jours de ma vie », se souvient Ahmad. 

A school teacher leans over the desk of two students who have a book open in front of them.
Ahmad assiste à un cours de rattrapage de langue arabe dans un centre d’apprentissage intégré soutenu par l’UNICEF dans le village de Qseibeh, à Quneitra, dans le sud de la Syrie. [UNICEF/UN0674214/Shahan]

Ahmad a commencé à suivre le programme d’auto-apprentissage spécialement conçu pour les enfants non scolarisés afin de les aider à rattraper les cours manqués. Ahmad a également acquis des compétences essentielles et bénéficié des activités récréatives au centre. 

« J’étais bouleversé à l’idée de reprendre mes études, mais ce n’était pas que cela. J’avais l’impression de pouvoir reprendre une vie normale, de rencontrer des amis de mon âge et de pratiquer des activités comme du sport, de l’artisanat et de la peinture. J’ai acquis une plus grande confiance en moi et tout cela m’a rendu heureux », explique Ahmad. 

« Trois mois après ma première session au centre, je faisais partie des 21 élèves de mon village qui sont retournés à l’école », ajoute-t-il avec fierté. Il a été réinscrit en 7e année dans une école communale. Lorsque nous avons rencontré Ahmad en mai 2022, il se préparait pour ses examens. 

Il avait recommencé à garder des moutons, mais seulement après l’école et les fins de semaine pour avoir plus de temps pour étudier. « Lorsque je vais travailler, je prends mes livres avec moi pour lire et faire mes devoirs. Je dois travailler dur pour rattraper ce que j’ai manqué à l’école au cours des deux dernières années », dit-il. 

A boy sitting on a stack of hay in a farm. He is looking down and reading a book. There are sheep behind him.
Ahmad se prépare pour ses examens finaux en gardant des moutons dans le village de Qseibeh, à Quneitra, dans le sud de la Syrie. [UNICEF/UN0674217/Shahan]

Ahmad fréquente toujours le centre d’apprentissage intégré soutenu par l’UNICEF pour suivre les cours de rattrapage dans les principales matières : arabe, anglais, mathématiques, science, physique et chimie. « Je veux devenir enseignant et surtout aider les enfants de mon village qui ont dû abandonner l’école. Je veux aider chacun d’entre eux, les instruire et changer leur vie comme la mienne a changé », conclut-il. 

Les centres d’apprentissage intégrés soutenus par l’UNICEF offrent aux enfants et aux jeunes non scolarisés ou qui risquent d’abandonner l’école de multiples voies d’apprentissage et les dotent des compétences nécessaires pour poursuivre leurs études et passer en douceur de l’apprentissage au marché du travail. 

Depuis 2021, l’UNICEF a aidé près de 4 000 enfants dans 12 centres d’apprentissage intégrés en Syrie en leur offrant un soutien à l’éducation, y compris des activités récréatives éducatives, des cours de rattrapage, le programme d’auto-apprentissage et un soutien aux examens nationaux pour les élèves de 9e et de 12e années. Les activités ont été financées par le Fonds américain pour l’UNICEF par l’entremise de Educate A Child, le gouvernement norvégien, le téléthon NRK par l’entremise d’UNICEF Norvège et le financement thématique humanitaire mondial de l’UNICEF. En 2022, 7 000 jeunes ont acquis des compétences essentielles, ont reçu une éducation à la citoyenneté, et suivi des cours d’alphabétisation, de calcul et d’informatique dans les centres d’apprentissage intégrés. Ils ont également été soutenus grâce à un engagement social et civique par l’entremise d’initiatives dirigées par des jeunes, de sports pour le développement et d’activités d’art social pour la cohésion. Une vingtaine d’équipes mobiles ont été formées pour aider leurs pairs avec des activités communautaires. 


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