Soutenir les clubs scolaires pour filles afin de mettre un terme au mariage d’enfants en Éthiopie
« Je suis allée au poste de police lorsque mes parents m’ont dit que j’allais me marier », explique Mestawet Mekuria, âgée de 14 ans et élève de 7e année de l’école primaire Ayti, située dans la région d’Amhara, dans le nord de l’Éthiopie. Elle compte parmi les 20 étudiantes qui ont pu échapper au mariage grâce à l’école.
« À notre club scolaire pour filles, j’ai appris beaucoup sur le mariage d’enfants et sur ses conséquences. J’ai dit à mes parents que je ne voulais pas me marier, mais ils ont refusé. C’est alors que je me suis précipitée au poste de police. » Mestawet s’est adressée à la police en pensant que ses parents ne recevraient qu’un sévère avertissement. Mais ils ont eu bien plus que cela. Ses parents ont été arrêtés, puis emprisonnés pendant deux semaines pour avoir violé la loi.
« J’étais triste lorsqu’ils ont été arrêtés, mais ils avaient refusé de m’écouter. »
Le mariage précoce, c’est-à-dire le mariage formel ou l’union informelle d’enfants âgés de moins de 18 ans, est courant dans toutes les régions de l’Éthiopie. Selon l’Enquête démographique sur la santé en Éthiopie menée en 2011, la région d’Amhara affiche le deuxième taux le plus élevé de mariage d’enfants à 56 pour cent, tout juste après la région de Benishangul-Gumuz, qui affiche un taux de 58 pour cent.
Le mariage d’enfants perpétue souvent le cycle de pauvreté intergénérationnel. Lorsque les filles sont mariées très tôt, leur possibilité de mener une vie saine et prospère est menacée. Il est prouvé que les filles qui se marient à un très jeune âge sont moins susceptibles de terminer leurs études et plus susceptibles de subir des mauvais traitements et des actes de violence domestique. Les jeunes adolescentes sont aussi plus susceptibles de mourir de complications lors d’une grossesse ou d’un accouchement que les femmes dans la vingtaine.
Le soutien accru du club pour filles dans le cadre des efforts accélérés visant à mettre fin au mariage d’enfants à Zigem Woreda, dans la région d’Amhara, a été instauré en 2015 par le Bureau de la condition féminine et de l’enfance, avec l’aide du Programme mondial de l’UNICEF et du FNUAP pour accélérer la lutte contre le mariage d’enfants.
Le programme de lutte contre le mariage d’enfants vise à renforcer la capacité des filles en leur procurant une formation aux aptitudes essentielles, en les renseignant sur leurs droits et sur les services à leur disposition, et en améliorant la réactivité des écoles et des services juridiques. Il cible également les familles et les communautés pour qu’elles changent d’attitude afin de mettre un terme à cette pratique et qu’elles encouragent d’autres possibilités pour les filles, comme leur éducation.
Selon Abebe Adamu, l’un des formateurs du Bureau de la condition féminine et de l’enfance, 106 filles ont échappé au mariage en 2016 et 55 autres en 2017. « La communauté est maintenant consciente que le mariage d’enfants est préjudiciable. Les élèves sont aussi plus conscientes de leur droit de refuser toute proposition de mariage qui leur est faite contre leur gré », explique-t-il.
Wubayehu Tilahun, la coordonnatrice du club pour les filles et une enseignante à l’école primaire Ayti, est ravie des résultats du club. « Voir mes élèves poursuivre leurs études me procure un grand plaisir. Ici, à Ayti, nous avons permis à 20 filles d’échapper au mariage au cours des deux dernières années et nous continuerons de lutter contre cette pratique préjudiciable. »
Bien que les parents de Mestawet aient été fâchés de ce qui leur est arrivé, ils ont plus tard fait la paix avec elle grâce à une médiation menée par les anciennes et anciens du village. « Mes parents comprennent maintenant en quoi consiste le mariage d’enfants et ses conséquences. Ils ne sont plus en colère contre moi », dit Mestawet.
Mestawet veut devenir médecin ou enseignante. Il faudra peut-être des années pour qu’elle réalise ses rêves, mais, entre-temps, elle continue de protéger les filles de son village, y compris sa propre sœur cadette, contre le mariage précoce.
« Le mariage d’enfants est une pratique néfaste, et je veux que les filles poursuivent leurs études comme je le fais. J’ai vu des camarades de classe quitter l’école parce qu’elles se sont mariées. Au village, je parle toujours du mariage d’enfants à mes amies et je continuerai de le faire avec d’autres », conclut Mestawet.