Le 12 juin 2014
Déplacés en raison du conflit, les femmes enceintes et les enfants sont les personnes les plus vulnérables au Soudan du Sud.
Venu au monde dans l’obscurité du petit matin, sur un matelas en mousse mince et étroit, au camp de Mingkaman pour personnes déplacées au Soudan du Sud, il n’est âgé que de quatre heures lorsque nous faisons sa connaissance.
L’abri de plastique est trop bas pour s’y tenir debout; le sol de terre est humide, et, en cette saison des pluies, l’air est épais et lourd à respirer.
Tenant son bébé enveloppé dans un linge sur ses genoux, la mère est fatiguée, heureuse et fière. Cet enfant est le premier de Kuei, qui est âgée de 19 ans, et de son mari Kang, âgé de 23 ans. Kuei allaite déjà son fils, ce qui est primordial, car un bébé nourri au sein a au moins six fois plus de possibilités de survivre qu’un bébé qui ne l’est pas.
Kuei était enceinte de quatre mois lorsque son mari et elle ont fui la violence et les combats qui faisaient rage aux environs de Bor, dans l’État de Jonglei, à la mi-décembre 2013. Ils ont fui leur village en emportant seulement quelques vêtements, en se cachant et en dormant dehors, au bord du Nil, pendant des semaines avant de pouvoir enfin traverser le fleuve et trouver une certaine sécurité au camp de Mingkaman pour personnes déplacées, dans l’État voisin de Lakes. Le Soudan du Sud affichait l’un des taux de mortalité maternelle les plus élevés du monde avant le début du conflit en cours. Ce conflit a causé le déplacement de plus de 1,3 million de personnes.
Kuei et sa famille comptent parmi les personnes déplacées. Depuis son arrivée à Mingkaman, elle vient à la clinique de soins de santé primaires et maternels soutenue par l’UNICEF. « Hier, je suis venue à la clinique de soins prénataux. J’ai vu la sage-femme, qui m’a dit que le moment était venu pour moi d’accoucher, mais je n’avais pas encore perdu les eaux », explique Kuei.
Florence, une sage-femme qualifiée, a remis à Kuei une trousse d’accouchement sans danger. Cette trousse comprend les articles nécessaires à de bonnes conditions d’hygiène pour une femme en travail, et pour ceux et celles qui l’aident à accoucher. La trousse contient un drap de plastique, du savon, une lame de rasoir propre à double tranchant, du fil pour le cordon ombilical, et des directives illustrées expliquant comment mettre un enfant au monde.
« Je suis donc rentrée chez moi, et le travail a commencé pendant la nuit », raconte Kuei. Sa belle-mère est restée près d’elle pendant que Kang partait chercher Florence, mais tout s’est passé si vite que, lorsqu’il est revenu, vers quatre heures, la belle-mère de Kuei l’avait déjà aidée à accoucher, à l’intérieur de son abri temporaire. La trousse d’accouchement sans danger s’était avérée très utile.
Peu de temps après, Florence est arrivée de la clinique avec son matériel médical pour examiner le bébé et la mère. Portant des gants de plastique, elle a procédé à un examen complet et a conclu qu’ils étaient tous les deux en bonne santé. Florence a promis de revenir le lendemain matin et elle a demandé à Kuei de se présenter dans trois jours à la clinique pour une autre visite médicale.
Avec une population de plus de 100 000 personnes, les centres de santé qui existaient déjà à Mingkaman n’étaient pas en mesure de répondre aux besoins des personnes réfugiées, qui arrivaient rapidement en grand nombre.
« Au début, la situation générale était très mauvaise, et de nombreuses mères accouchaient sans aide. L’UNICEF, l’OMS et d’autres partenaires se sont employés à soutenir les systèmes de santé, et nous appuyons maintenant cinq différents partenaires de la santé à Mingkaman », explique le Dr Garang Kur Apiu, le spécialiste de l’UNICEF au Soudan du Sud en matière de santé et d’alimentation.
L’UNICEF a fourni du matériel de santé génésique d’urgence à tous les partenaires de la santé qui travaillent à Mingkaman, et l’organisme soutient des activités communautaires de mobilisation sociale et des messages d’intérêt public radiodiffusés pour que les femmes soient sensibilisées à l’importance des soins prénataux, ainsi qu’à l’importance d’accoucher dans un centre de santé et de recevoir des soins après la naissance.
Le mari de Kuei est très fier d’avoir un fils, mais il est aussi inquiet. « L’accouchement s’est bien passé, mais le plus grand problème maintenant est que, dans ce camp, je n’ai pas de travail, et qu’une femme qui vient d’accoucher a besoin de beaucoup de choses, comme des vêtements et une alimentation adéquate. De nombreuses choses que je ne suis pas en mesure de lui procurer en raison de la situation actuelle. »
Le fils de Kuei et de Kang n’est maintenant âgé que d’une journée, mais il reçoit déjà tout l’amour et une grande partie de l’aide dont il aura besoin pour survivre au Soudan du Sud.