Haïti: environ 8 500 femmes et enfants déplacés par la « guérilla urbaine » en deux semaines
Port-au-Prince, 15 juin 2021 - Une nouvelle vague de violence des gangs dans la capitale haïtienne, Port-au-Prince, a forcé près de 8 500 femmes et enfants à fuir leur foyer en seulement deux semaines, a alerté l'UNICEF aujourd'hui.
Depuis début juin, des affrontements entre gangs armés rivaux ont éclaté dans les zones urbaines de Martissant, Fontamara et Delmas, et ont causé l'incendie ou la destruction de centaines de maisons.
« À chaque fois, les affrontements entre groupes armés sont plus violents et chaque fois, plus de femmes et d'enfants sont contraints de fuir leur domicile », a déclaré Bruno Maes, Représentant de l'UNICEF en Haïti. « Depuis le début de cette année, l'insécurité s'est intensifiée. Mais la capitale est désormais confrontée à une guérilla urbaine, avec des milliers d'enfants et de femmes pris entre deux feux. Les familles déplacées à qui j'ai parlé ont tout perdu et ont un besoin urgent d'eau potable, de nourriture, d'articles d'hygiène personnelle, de matelas, de couvertures et de vêtements ».
En seulement deux semaines, 2 045 femmes et 2 146 enfants ont trouvé refuge à Carrefour dans le sud-ouest de Port-au-Prince et à Bas Delmas au cœur de la ville. En plus, quelque 5110 autres personnes déplacées (avec 2 095 femmes et 2 199 enfants) seraient hébergées par des familles d'accueil à Carrefour ou dans d'autres régions voisines ou se sont réfugiées dans d'autres régions du pays.
Pendant ces neufs derniers mois, l'escalade de la violence et des actes criminels dans la capitale haïtienne ont provoqué le déplacement de plus de 13 900 personnes, selon le bureau de l'ONU chargé de la coordination humanitaire (UNOCHA) avec environ 5 695 femmes et 5 984 enfants. 650 000 personnes sont actuellement affectées par le déplacement en Haïti, dont 500 000 dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince.
Une enquête menée par l'UNICEF en mai révèle qu'un jeune sur cinq en Haïti pense que la violence empêche les enfants d'aller à l'école, et près d'un jeune sur deux rapporte que la peur est le principal effet de la violence sur les enfants.
Ce récent pic de violence se développe au milieu de la recrudescence des cas de COVID-19 en Haïti. Du 1er avril au 5 juin 2021, les cas confirmés sont passés de 12 840 à 16 079, avec un taux de létalité allant de 1,95 % à 2,15 %. Au cours de la même période, Haïti a enregistré plus de 27% des 346 décès depuis le début de la pandémie l'année dernière.
« Les cas de COVID-19 en Haïti n'ont jamais été aussi élevés depuis le début de la pandémie mais en ce moment, certains patients meurent parce que la violence des gangs armés empêche les ambulances de leur fournir de l'oxygène et des soins d’urgence», a déclaré Bruno Maes. « C'est inacceptable. Les agents de santé doivent immédiatement avoir un accès sans limites à toutes les zones pour transporter les patients qui ont besoin d'une assistance d'urgence, et leur travail vital ne doit pas être entravé par des groupes armés. Fournir une aide humanitaire aux femmes et aux enfants déplacés dans les abris n'est pas suffisant. Beaucoup se retrouvent encore sans aucune aide humanitaire dans des familles d’accueil. À moins que nous ne regagnions l'accès aux zones touchées par la violence des gangs, davantage de vies risquent d'être perdues».
Au milieu de l'insécurité croissante et de la violence des gangs dans la capitale, l'UNICEF appelle de toute urgence les groupes armés à fournir à tous les acteurs humanitaires un accès sans restriction aux populations touchées.
Cette recrudescence de la violence a également éclaté pendant la saison des ouragans avec des craintes de pluies fréquentes et accrues, doublant les risques de maladies d'origine hydrique et d'infections respiratoires aiguës pour les enfants. De nombreux enfants souffrent de malnutrition dans les zones urbaines de Port-au-Prince comme Martissant et Fontamara avec des taux de vulnérabilité élevés et un accès limité aux services sociaux de base.
Malgré l'accès humanitaire limité à la zone de Martissant et Fontamara, l'UNICEF a pu distribuer rapidement des articles d'urgence aux femmes et aux enfants déplacés abrités dans un gymnasium en début de semaine dernière, dont 700 kits d'hygiène, 700 jerricans, 20 kits d'hygiène pour cinq familles, 10 000 masques, 212 matelas et 70 bâches en plastique.
L'UNICEF a fourni également des articles médicaux pour appuyer une clinique mobile de santé intégrée pour dépister et traiter la malnutrition chez les enfants déplacés et mener des consultations prénatales et des tests de dépistage du VIH chez les femmes enceintes.
Pour 2021, l'UNICEF a besoin de 48,9 millions de dollars américains pour répondre aux besoins humanitaires de 1,5 million de personnes en Haïti, dont plus de 700 000 enfants, qui ont été considérablement exacerbés par la pandémie du COVID-19. Jusqu'à présent, cet appel humanitaire est resté presque complètement sous-financé.
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