Par Razan Rashidi
Derek-Al Malikiyah, nord-est de la Syrie, le 12 août 2014 – « Nous avons marché pendant plus de 20 heures, sans eau ni nourriture », raconte Juan, une adolescente qui est arrivée il y a trois jours au camp de réfugiés de Nawrouz, dans le nord-est de la Syrie, avec huit membres de sa famille.
Juan appartient à la minorité yézidie, dont beaucoup de membres fuient en Syrie depuis les montagnes de Sinjâr, en Iraq. Sinjâr est un quartier de Ninive dans le nord-ouest de l’Iraq qui compte une population d’au moins 150 000 enfants parmi lesquels beaucoup sont déplacés. Ce quartier a été repris dimanche par l’État islamique (anciennement connu sous le nom d’État islamique en Iraq et au Levant).
Des milliers de familles yézidies et de nombreux enfants arrivent chaque jour au camp pour personnes réfugiées nouvellement établi en Syrie, à 40 kilomètres de la frontière iraquienne. Hier, on estimait à 5 000 le nombre de familles réfugiées dans le camp, les enfants comptant pour plus de 60 pour cent de cette population.
Les nouveaux arrivants et arrivantes sont épuisés et déshydratés, et ont désespérément besoin d’une aide d’urgence. Chaque jour, la température avoisine les 45 oC : beaucoup de personnes souffrent d’insolation ou de coup de chaleur.
« Ce garçon a marché de l’Iraq jusqu’en Syrie », explique une mère de sept enfants en pointant du doigt son fils âgé de cinq ans.
Le 12 août, une équipe des Nations Unies a distribué dans le camp des fournitures essentielles à la survie, y compris des fournitures de l’UNICEF, incluant des biscuits à haute teneur énergétique, des trousses de produits d’hygiène et des vêtements pour les enfants, qui arrivent le visage couvert de poussière et qui portent souvent des chaussures usées.
“« Nous avons vu des enfants et des familles arriver en grand nombre au camp, dans des camions et en très piteux état. L’UNICEF et les autres agences des Nations Unies s’emploient à apporter une aide d’urgence à ces familles », explique Eltayeb Adam, le directeur du bureau de l’UNICEF dans la ville voisine de Kameshli.
Selon les estimations, plus de 200 000 familles yézidies sont bloquées à la frontière du côté iraquien, et on s’attend à ce que beaucoup d’autres arrivent en Syrie dans les prochains jours.
« Nous avons entendu des choses horribles concernant les pratiques de l’État islamique; nous avons donc décidé de fuir pendant la nuit. J’étais inquiet pour ma belle-fille et mes petits-enfants. Il est difficile de marcher pour un homme de mon âge, mais nous n’avions pas d’autre solution », explique un homme âgé.
Des organisations d’aide humanitaire locales, dont l’Association de secours kurde, le Croissant-Rouge du Kurdistan et l’ONG Al Ihsan, ont entrepris des opérations de secours la semaine dernière, lorsque l’afflux de personnes réfugiées a commencé.
« Nos ressources sont extrêmement limitées. Les réfugiés continuent de se présenter en très grand nombre. Dès que nous pensons qu’une famille est installée dans une tente, nous en trouvons dix autres qui viennent d’arriver », dit Nisreen, une jeune bénévole de l’Association de secours kurde.
Des résidentes et résidents kurdes qui se trouvent en Syrie accueillent les personnes réfugiées épuisées dès leur arrivée, en leur offrant des collations et de l’eau. « Nous sommes toutes et tous là pour leur offrir au moins un sourire après ce qu’ils ont vécu », déclare un jeune bénévole kurde se trouvant au poste de réception et de transit de Mabada.
Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et des organisations d’aide humanitaire locales ont fourni plus de 500 tentes, mais les besoins sont énormes, et d’autres enfants et familles ne cessent d’arriver. À l’intérieur du camp, il y a un véritable risque d’épidémie de maladies, en raison des mauvaises conditions d’hygiène, de l’absence de chloration de l’eau et du drainage inadéquat de l’eau.
« Nous voulons simplement un endroit sécuritaire. Tous les pays sont en guerre; je suis fatiguée », déclare Roshan, une mère de six enfants qui est arrivée le 12 août au camp. Ses enfants étaient couverts de poussière et n’avaient que les vêtements qu’ils portaient sur eux.
Dans un communiqué diffusé le 5 août, l’UNICEF exhortait toutes les personnes d’influence à accorder immédiatement aux enfants et aux femmes un accès gratuit et sécuritaire aux camps pour personnes réfugiées, et à respecter les mesures de protection particulières convenues pour les enfants en vertu du droit international humanitaire et des droits de l’homme.
Razan Rashidi est chargé des communications pour l’UNICEF et a visité le camp pour personnes réfugiées de Nawrouz, en Syrie.